En cette période si particulière, nous sommes obligés d'annuler la traditionnelle Présentation de saison #2...
Nos voeux 2021
« Fermez les théâtres ! Quoi qu'il en coûte. »
Quoi qu'il en coûte ? Je ne veux pas vous parler ici des fins de mois difficiles pour une bonne partie de notre profession, ni du désarroi de ne pas pouvoir exercer son métier, ni de l'humiliation d'être baladé de quinzaine en quinzaine attendant que notre gouvernement – qui se voudrait irréprochable – daigne nous donner un autre rendez-vous.
Non, ce n'est pas ce dont il faut parler ici. Les théâtres fermés, les lieux de culture fermés, ce n'est pas seulement le problème des auteurs, des comédiens, des régisseurs, de tous ceux qui font le métier. C'est aussi le problème du public, des citoyens que nous sommes, empêchés de rêver, de s'émouvoir ou de rire ailleurs que seul chez soi devant un écran. Parce ce que le sel de la vie c'est justement de sortir de chez soi, d'aller à la rencontre de ce qui nous est différent, de ce qui nous étonne. Le sel de la vie, où est-il aujourd'hui ?
Couverts comme des petits feux isolés, nous voici repliés sur nous-mêmes, peureux, inquiets. Notre seul horizon : métro, boulot, dodo, 18h, ou 20h pour les chanceux.
Peut-être que nous, adultes, avons la capacité de prendre du recul, convaincus qu'il ne s'agit là que d'un long, long tunnel, que les beaux jours reviendront. Mais pensons à la jeunesse, aux enfants qui n'ont pas cette expérience, qui entrent dans la vie : quelle image de l'existence nous leurs proposons là ?
Janvier est donc le mois des vœux ? J'en ai plein à vous offrir : se revoir ailleurs qu'au rayon "surgelés" d'une grande surface bondée, assister à d'autres spectacles que celui de la messe dominicale, manifester sa colère dans la rue sans y laisser un œil ou une main... des vœux qui paraîtraient grotesques et absurdes à celui qui les aurait lus il y a trois, dix, ou vingt ans. Ce sont pourtant ceux de millions de français aujourd'hui. A croire que nous, les enfants de Voltaire, sommes tombés bien bas... Je ne fais pas parti de ceux qui pensent que l'épidémie est un mirage ou un complot. Il s'agit bien d'un sérieux problème. Mais comme les trains, un problème peut en cacher un autre : elle sera longue à remonter, la pente pour regagner notre liberté.
Alors un vœu, un seul, pour cette nouvelle année : que 2021 soit l'année de notre liberté reconquise !
Gilles Granouillet